Le Rôle des parents dans la gestion des émotions de l’enfant

Aurélie Philemy
25/09/2021
Un papa traverse un champ de coquelicots en portant deux de ses enfants

Vous êtes-vous déjà retrouvé dans un contexte où un enfant pleurait à chaudes larmes et / ou hurlait ? Avez-vous su comment réagir ? Non ? Ne vous en faites pas : bon nombre de personnes se sont un jour retrouvées dans votre situation. Pourtant, des outils existent pour permettre aux parents d’entrer dans une parentalité bienveillante. Vous ignorez comment conseiller ces derniers en tant que professionnel de santé, du social ou de l’éducation ? Pas d’inquiétude : nous vous expliquons tout sur le rôle des parents dans la gestion des émotions !

L’apprentissage du spectre émotionnel chez les enfants

Les caprices existent-ils ?

Gros plan sur le visage d'une petite fille qui pleure

« Ohhh, comme cet enfant est capricieux ! »

Cette phrase, combien de fois l’avez-vous entendue ? Face à un enfant qui exprime ouvertement ses émotions, et qui se calme difficilement, il est devenu courant d’affirmer qu’il ne s’agit là que d’un caprice.

Et si c’était plutôt le témoignage d’une mauvaise maîtrise de ses émotions ? Rappelons-le : les enfants ont un cerveau encore immature, et leurs fonctions exécutives le sont tout également. Ils sont en pleine construction, et beaucoup de situations sont, pour eux, des nouveautés, surtout s’ils ont moins de 5 ou 6 ans. Difficile, alors, de ne pas se laisser submerger par des émotions importantes (celles-ci donnant lieu à des comportements jugés impulsifs et inadaptés)…

Pourtant, en apprenant aux enfants à gérer leurs émotions, ces situations peuvent être évitées. Car, disons-le tout de suite : les caprices n’existent pas. Il s’agit plutôt d’une accumulation de ressentis qui, parce qu’ils ne sont pas bien contrôlés, vont conduire à des comportements inappropriés.

Mais, alors, pourquoi parle-t-on de caprices ? En réalité, les adultes ont tendance à évoquer ce terme lorsque la raison du sentiment négatif éprouvé par l’enfant (qu’il s’agisse de tristesse ou de colère) n’est ni comprise, ni identifiée. Dire que l’enfant fait un caprice c’est sous-entendre que l’enfant manipule l’adulte. C’est alors prêter des intentions très mauvaises à un enfant, ce qui entraîne chez l’adulte de la colère et l’impossibilité d’accueillir les émotions de l’enfant.

Quel est le rôle des émotions ?

Empêcher l’enfant de ressentir tout le spectre émotionnel (composé de sentiments positifs comme négatifs) est fortement déconseillé. Pourquoi ? Tout simplement parce que les émotions sont :

  • Involontaires. Ainsi, l’enfant ne se met pas en colère, mais il ressent de la colère. Cette différence de vocabulaire est importante : elle permet de se mettre à la place de l’enfant et, surtout, de comprendre que l’émotion ressentie n’est ni volontaire, ni souhaitée. Au contraire, ce dernier pourrait vouloir que cette dernière cesse.
  • Vitales. Elles sont liées à des besoins (de sécurité, sociaux, affectifs, etc.). La non-satisfaction de ces besoins déclenche des émotions. Ainsi, le dégoût et la peur visent à protéger l’enfant de certaines situations pour lesquelles le besoin de sécurité n’est pas satisfait. En effet, s’il a peur, il fera plus attention et risquera moins de se faire mal. La colère, quant à elle, l’aide à franchir certains obstacles (pour éviter d’être harcelé au sein de l’école, par exemple). La tristesse lui permet de demander de l’aide, tandis que la joie lui donne de l’énergie et lui permet d’être accepté dans un groupe social.

Un enfant se met à crier apparemment « sans raison » dans un supermarché ? Ce comportement négatif est engendré par certaines émotions qui sont, nous venons de le voir, involontaires et vitales. Aussi, vouloir stopper le comportement non souhaité risquerait de se révéler moins efficace que chercher à maîtriser la cause ayant engendré la colère ou la tristesse ressentie.

L’importance de la gestion des émotions

Ne pas laisser une émotion s’exprimer peut-il être dangereux ? Oui, dans certaines situations.

Ainsi, un accident ou une injustice pourrait bien devenir un épisode traumatisant (entraînant dépression et angoisses)… Mais rassurez-vous : plus tôt les émotions désagréables sont identifiées et gérées, moins il existe un risque pour que celles-ci perdurent dans le temps !

Vous vous demandez peut-être quels sont les autres effets positifs d’une bonne gestion des émotions ? Maintien de bonnes relations sociales, meilleure gestion des conflits, plus grande réussite scolaire, meilleure intelligence émotionnelle… autant de raisons pour trouver les bons outils pour apprendre aux enfants à réguler leurs émotions !

Pour cela, il est important de retenir que les émotions :

  • empêchent la réflexion, surtout dans le cas d’émotions fortes. Ainsi, pour pouvoir raisonner avec un enfant, il faut d’abord faire cesser l’émotion. Vous rappelez-vous d’une fois où vous vous sentiez en colère et n’étiez plus en mesure d’entendre quoi que ce soit ? La même chose arrive sûrement au petit, et ce, de manière d’autant plus importante qu’il n’a pas les outils lui permettant de gérer ses ressentis. La première étape, avant d’essayer de raisonner avec l’enfant, est donc d’accueillir et d’accepter son émotion. Cela permettra à celle-ci de passer plus rapidement, tout en développant l’estime de soi du petit.
  • peuvent être gérées par le mouvement. Celui-ci permet en effet d’évacuer l’émotion. Cela peut passer, par exemple, par la course lorsqu’on se sent joyeux, ou par le balancement lorsqu’on est triste.

Ainsi, l’apprentissage de la gestion des émotions chez les plus petits est important pour leur permettre de trouver, par eux-mêmes, les bons moyens pour les réguler et les exprimer. Parce qu’ils sont présents tout au long de la vie de leur enfant, les parents ont un rôle essentiel dans cette gestion des émotions.

Le rôle des parents dans la gestion des émotions

Des figures d’attachement

Connaissez-vous la théorie de l’attachement ? Conceptualisée dans les années 1960 par John Bowlby, un psychiatre américain, elle décrit les mécanismes utilisés par le nourrisson pour combler ses besoins émotionnels. Pleurs, cris, larmes… autant d’outils à sa disposition pour indiquer sa détresse.

Car, non, un bébé ne pleure jamais sans raison : s’il se sent en situation de danger, alors il pleurera. Or, être « loin » d’une figure d’attachement – auprès de qui il se sent profondément en sécurité – peut déclencher ce « système d’alarme ». Évidemment, cette distance varie en fonction du bébé, de ses besoins émotionnels et de la situation vécue à un instant T.

Votre enfant se comporte différemment avec vous ? Il se met à hurler dès que vous vous éloignez un peu ? Alors vous êtes sa figure d’attachement principale, autrement dit, sa source d’amour inconditionnel. L’émotion qu’il retient avec les autres, il la déchargera auprès de vous. Aussi, pas d’inquiétude ! Ce comportement est instinctif et tout à fait normal.

Bien souvent, ce sont les parents qui font office de figures d’attachement. Ces derniers :

  • font face aux plus grandes émotions de leurs enfants ;
  • leur transmettent des valeurs, leurs codes moraux, une éducation, etc.

C’est pourquoi les parents ont un rôle clé dans la gestion des émotions des enfants.

Apprendre à gérer ses propres émotions

Vous vous sentez irritable ou en colère ? Dans ce cas, mieux vaut vous retirer plutôt que d’essayer d’accompagner l’enfant. Rappelez-vous : les émotions empêchent le raisonnement. Si vous éprouvez vous-même un sentiment fort, il vous sera sans doute difficile d’aider le petit.

Mais, alors, que faire ? Pas de panique ! Vous êtes tout à fait en droit de dire : « Je suis en colère, je sors de la pièce, mais je reviens. »

Vous avez l’impression d’abandonner votre bambin ? Insistez bien sur le : « je reviens », c’est important pour ne pas laisser l’enfant croire qu’on l’abandonne à son sort. Il pourrait néanmoins se mettre à hurler plus fort, mais ne culpabilisez pas pour autant : vous êtes en droit de prendre un moment pour vous. Si vous ne le faites pas, la situation pourrait bien ne pas être désamorcée.

Aussi, retirez-vous et reprenez votre calme avant de proposer un câlin ou un jeu.

Un modèle à suivre pour les enfants

Par ailleurs, ne l’oubliez pas : les parents sont un modèle à suivre pour les enfants. La manière dont ces adultes réguleront leurs émotions aura un impact direct sur la gestion émotionnelle des plus petits.

Vous avez indiqué être en colère et devoir partir pour vous calmer seul·e ? Ceci participe à l’apprentissage de la gestion des émotions chez les tout-petits. À force de voir ce comportement, ils pourraient bien finir par l’adopter eux-mêmes lorsqu’ils ressentent de la colère, avant même que la situation n’empire.

Quelques outils à mettre en place pour apprendre la gestion émotionnelle aux enfants

Loin de nous l’idée de vous conseiller des outils classiques tels que le coussin de la colère ou la bouteille du calme… Car ces derniers ne sont pas toujours accessibles, ni adaptés (à l’émotion ou socialement). Au contraire, nous vous proposons 4 outils à utiliser en toute situation !

Outil numéro 1 : Accepter l’émotion de l’enfant

Votre enfant est en colère ? Il a un gros chagrin ? Accepter l’émotion est une première étape essentielle pour lui permettre de la gérer. Mais qu’est-ce que cela signifie, exactement ? Eh bien, il s’agit d’accueillir l’émotion sans jugement et avec empathie.

Pour y parvenir, il faut :

  • accepter le mouvement (les sauts, le fait de courir, etc.) ;
  • accepter que l’enfant crie ou pleure (mais non qu’il tape) ;
  • accepter qu’il souffle parce qu’il est agacé (il faut alors lui expliquer que cela peut être vu comme impoli) ;
  • considérer le problème du point de vue de l’enfant ;
  • nommer ou reformuler son émotion. Par exemple : « Je vois que tu es en colère. »

À l’inverse, il s’agit d’éviter les comportements suivants :

  • consoler, conseiller, raisonner, menacer ou imposer une solution ;
  • dire ce qu’il « devrait » ressentir ;
  • voir son enfant comme quelqu’un qui a les mêmes pensées que soi.

Outil numéro 2 : Valider les sentiments de l’enfant

Une fois que l’émotion a été entendue et identifiée, vous devez valider le vécu de la personne.

Dans le cas où vous poseriez une question (comme : « Es-tu en colère ? »), cette dernière doit être fermée, c’est-à-dire que l’enfant ne peut répondre que par « oui » ou par « non ». En effet, il est souvent plus facile de répondre à une question fermée qu’à une question ouverte lorsque nous sommes soumis à une forte émotion.

De plus, évitez les questions en « pourquoi ». En effet, les interrogations commençant par « pourquoi » mettent les enfants en difficulté, ces derniers n’arrivant bien souvent pas à identifier la raison de leur colère ou de leur peur.

Outil numéro 3 : Les câlins et le mouvement

Nous l’avons déjà évoqué : le mouvement permet de faire passer certaines émotions.

Parmi les solutions adaptées, vous pouvez faire plusieurs propositions à l’enfant, comme faire des chatouilles, aller se promener ou faire du vélo, des massages ou des câlins.

En particulier, les câlins entraînent la production d’ocytocine, une hormone du bonheur, par le cerveau. Ceci conduit à une sensation d’apaisement et de bien-être quasi immédiat. Ainsi, cet outil permet de lutter efficacement contre les angoisses et la tristesse, tout en renforçant les relations parents / enfant.

Outil numéro 4 : Le petit temps à 2

Ce moment privilégié entre le parent et son enfant est à réaliser dès que le petit rentre de l’école.

Il présente deux avantages :

  • il permet de remplir son « réservoir affectif », ce qui est essentiel pour ne pas se laisser envahir par la fatigue (pouvant entraîner colère, frustration, etc.) ;
  • il permet également d’offrir un moment de calme à l’enfant, afin de faire retomber la pression ou l’excitation une fois rentré de l’école.

Voici un conseil pour permettre aux adultes de trouver le temps de le faire : décider d’un temps : 5, 10 ou 15 min et mettre un chronomètre. Cela rassurera l’adulte car on a parfois l’impression que le jeu de l’enfant est toujours trop long quand il nous reste les devoirs, la préparation du repas, les douches à gérer… Enfin, 2e effet, ce ne sera pas l’adulte qui interrompra ce temps agréable mais le chronomètre et c’est souvent beaucoup plus facile à supporter pour l’enfant.

Nous conseillons également de laisser le petit choisir son activité, pour lui permettre de faire quelque chose qu’il aime, qui le rassure et le calme.

Pour entrer dans une parentalité bienveillante, avoir conscience de l’importance des émotions est essentiel, avant même de connaître les outils permettant de les gérer ou de s’entraîner aux habiletés parentalesLe rôle des parents dans la gestion des émotions chez les enfants étant très important, il s’agit donc avant tout d’apprendre à ces derniers les mécanismes engendrant ces ressentis. Vous vous demandez encore comment les accompagner de manière efficace ? Consultez notre formation sur le sujet !

L’Autrice

Aurélie Philemy
Je suis Aurélie Philémy, psychomotricienne depuis 15 ans, installée à Chalon-sur-Saône en libéral depuis 2013. J'attache particulièrement une importance aux enfants qui ont des besoins spécifiques, mais pas seulement. Je travaille avec les parents présents pendant les séances et aborde particulièrement le soutien parental et la gestion des émotions.

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